Pedro Romo – loom weaver

We just arrived in Tlaquepaque town, in front of Pedro Romo’s house, a pretty dwelling decorated with a lot of flowers and potteries, called « la casa de los abuelos ». His daughter invites us to wait in the vestibule, a true museum of handicrafts collected over the years, old photos, and of course, woven pieces, ranging from carpets to coasters, from a Pierre Clerc painting to a « sarape » (Mexican poncho). Pedro arrives, coquettishly perfumed, greets us with open arms and begins to tell us his story. Heir to a know-how transmitted for 3 generations, he tells us how his grandfather learned to weave, from an early age, by going to the factory, then his father thereafter, and later himself, coming back from school. With his brothers and sisters, they trained on miniature loom that his father had specially designed for them. Over the years, Pedro began to get more involved in the family business, until he decided to pursue the tradition, which was a great relief for his father, who feared that this heritage would disappear after his death.

Nous arrivons à Tlaquepaque, devant la maison de Pedro Romo, une jolie demeure ornée de fleurs et de céramique, nommée la « casa de los abuelos ». Sa fille nous fait patienter dans le vestibule, véritable musée de pièces d’artisanat récoltées au fil des ans, de photos anciennes, et bien sûr, de pièces tissées, allant du tapis au dessous-de-verre, d’un tableau de Pierre Clerc à un « sarape » (poncho mexicain). Pedro arrive, coquettement parfumé, nous salue à bras ouverts et commence à nous conter son histoire. Héritier d’un savoir-faire transmis depuis 3 générations, il nous raconte comment son grand-père a appris à tisser, dès son plus jeune âge, en allant à l’usine, puis son père par la suite, et ensuite lui-même, en rentrant de l’école. Avec ses frères et sœurs, ils s’entrainaient sur des métiers à tisser miniatures que son père avait spécialement conçus à leur taille. En grandissant, Pedro a commencé à s’impliquer de plus en plus dans l’entreprise familiale, jusqu’à reprendre le flambeau et perpétuer la tradition, ce qui fut un grand soulagement pour son père, qui craignait de voir cet héritage disparaître après sa mort.


Pedro turns out to be an inexhaustible innovator. He quickly understood that making shawls was no longer enough and he convinced his father to diversify their offer. His father, initially skeptical, ends up accepting and left this part of the market to Pedro, who since then, never stopped innovating and thus, attracting new customers. He would start a collaboration with Pierre Clerc, a famous abstract painter of the 60s and 80s, with whom he would translate his paintings to his loom and exhibit the result at the MOMA in New York. They will become friends and collaborate on various projects thereafter.

Pedro s’avère être un inépuisable innovateur. Il comprend très vite que faire des châles ne suffit plus et il convainc son père de diversifier l’offre de produits. Son père, d’abord sceptique, finit par accepter et laisse cette part du marché à Pedro, qui ne cesse d’innover et ainsi, d’attirer de nouveaux clients. Il va commencer une collaboration avec Pierre Clerc, célèbre peintre abstrait des années 60-80, avec qui il va traduire ses toiles sur son métier à tisser pour exposer le résultat au MOMA de New York. Ils se lieront d’amitié et collaboreront sur divers projets par la suite.


Pedro also inherited his grandfather’s knowledge regarding the natural fiber dyes. He tells us without embarrassment that, for lack of time, he no longer uses natural dyes, but aniline. He uncovers, from under a pile of magazines, an invaluable notebook, and yet in the way to be reduced to dust. This is the annotations notebook of the chemical formulas necessary for the creation of dyes, written by his grandfather and his father during their respective experiences. Failing to have a precise balance that would allow them to weigh to the nearest gram, the unit of measure they used at that time was the « mosca », or fly. They used to form a small mound of powder the size of a fly and considered it as a unit of measure. If a little more material was needed, they counted in « mosca pantagruela », or pantagruelic fly.

Pedro a également hérité des connaissances de son grand-père concernant la teinte de fibres naturelles. Il nous confie sans gêne que, faute de temps, il n’utilise plus de colorants naturels, sinon l’aniline. Il déniche, de sous une pile de magazines entassés, un carnet d’une valeur inestimable, et pourtant en phase de décomposition. Il s’agit du carnet d’annotations des formules chimiques nécessaires à la création des colorants, écrit par son grand-père et son père au fil de leurs expériences respectives. À défaut de posséder une balance assez précise qui leur permettrait une précision au gramme près, l’unité de mesure qu’ils utilisaient alors était la « mosca », mouche. Ils formaient un petit monticule de poudre de la taille d’une mouche et le considéraient comme unité de mesure. S’il fallait un peu plus de matière, ils comptaient alors en « mosca pantagruela », mouche pantagruélique.


Pedro mainly works with wool, cotton and jute yarn. The latter is similar to yarn made from agave fibers, except that it is imported from India, due to the lack of suppliers in Mexico. He shows us a carpet which he called « Aerial view over an agave field ». Most of his works are inspired by natural elements and have a poetic name that instantly takes us on a journey through the landscapes it evokes. Thus, we admire the canvas which will be used to make a handbag called « Atardecer in Puerto Vallarta » (sunset in Puerto Vallarta), or the wall carpet « Atardecer de otoño » which was inspired by a trip to a Natural Park in the United States with one of his sons.

Pedro travaille principalement la laine, le coton et le fil de jute. Ce dernier s’apparente au fil à base de fibres d’agave, à la différence qu’il est importé d’Inde, faute de trouver un fournisseur au Méxique. Il nous montre un tapis qu’il a intitulé « Vue aérienne sur un champ d’agaves ». La plupart de ses œuvres sont inspirées d’éléments naturels et ont un nom poétique qui nous fait instantanément voyager dans les paysages qu’il évoque. Ainsi, nous admirons la toile qui servira à confectionner un sac à main d’un « Atardecer en Puerto Vallarta » (coucher de soleil à Puerto Vallarta), ou encore le tableau mural « Atardecer de otoño » qui fut inspiré d’un voyage dans une réserve naturelle aux États-Unis chez un de ses fils.


We enter his workshop, invaded by many looms, including one gigantic, 4 meters wide, which was specially designed to weave the large paintings of Pierre Clerc. Pedro has worked with many artists, designers, decorators, his weavings are scattered all around the world, and still, he remains a simple and humble human being, with his feet firmly rooted on the pedals of his loom. As an unconditional worker, he hardly leaves his workshop for a few days, most of the time to get inspiration from the Pacific coast, at the risk of feeling his fingers itching to start a new weaving. The words he uses to talk about his work are similar to those of a painter. He talks about painting with the yarns. To make his designs, he puts a canvas under the weaving, with the detail grid of the pattern to be transcribed on the loom. He stores preciously all the drawings his father wove, painted in 1/1 scale on textured paper.

Nous traversons son atelier, envahi de nombreux métiers à tisser, dont un gigantesque de 4 mètres de large, qui a été spécialement construit pour réaliser les grandes toiles du peintre Pierre Clerc. Pedro travaille avec de nombreux artistes, designers, décorateurs, ses œuvres sont disséminées à travers le monde, et pourtant, il reste d’une simplicité et d’une humilité sans égale, les pieds bien enracinés sur les pédales de son métier à tisser. Travailleur invétéré, il ne s’éloigne guère de son atelier que pour quelques jours, la plupart du temps pour aller s’inspirer au bord de l’océan, au risque de sentir ses doigts le démanger de commencer une nouvelle toile. Les mots qu’il emploie pour parler de son métier s’apparentent à ceux d’un peintre. Il parle de peindre avec les fils. Pour réaliser ses dessins, il place une toile sous le tissage, avec le détail quadrillé du motif à transcrire sur le métier à tisser. Il conserve précieusement tous les dessins que son père tissait, retranscrit à l’encre à l’échelle 1/1 sur un papier texturé.


Pedro has tried many times to transmit his passion and all his knowledges about the weaving art. He even invited several schools, led workshops for his neighborhood, to his dismay, no one seems willing to learn and carry on the tradition. Among his descendants (he had 7 children), only his daughter seems to be interested in investing herself in the family business, which gives Pedro an immense relief. Her granddaughter even starts to play among her grandfather’s looms, much to the joy of the latter who sees himself 70 years earlier, when he would come home from school and would play on his miniature loom.
Pedro Romo is an artist with a big heart, a generosity and an unusual desire to transmit his passion, a great narrator and teacher, rich in anecdotes and stories. You could spend hours listening to him, in the hushed atmosphere of his studio, a veritable museum of relics, treasures, priceless testimonies of a heritage passed down across several generations.

Pedro a tenté, à maintes reprises, de transmettre sa passion et toutes ses connaissances à propos du métier de tisserand. Il a même invité plusieurs écoles, conduit des ateliers pour les gens de son quartier, personne ne semble disposé à apprendre et assurer la relève, à son grand désarroi. Parmi sa descendance (il aura eu 7 enfants), uniquement sa fille commence à s’intéresser et à s’investir dans l’entreprise familiale, ce qui donne à Pedro, du haut de ses 75 ans, un immense soulagement. Sa petite fille commence même à jouer dans les fils de son grand-père, à la plus grande joie de ce dernier qui se revoit lui-même, 60 ans plus tôt, lorsqu’il rentrait de l’école et qu’il jouait sur son métier à tisser miniature.
Pedro Romo est un artiste au grand cœur, d’une générosité et d’une envie de transmettre peu commune, un grand narrateur et professeur, riche d’anecdotes et d’histoires. De sorte que l’on pourrait rester des heures à l’écouter, dans l’atmosphère feutrée de son atelier, véritable musée de reliques, de trésors, d’objets, témoignages inestimables d’un héritage transmis à travers plusieurs générations.

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